Positionnement hiérarchique : Sous l’autorité du Chef de projet.
Conditions d’emploi : Stage de 4 à 6 mois à pourvoir pour l’obtention d'un diplôme de niveau Master 2
Créé le 1er janvier 2020, l’Office français de la biodiversité (OFB) est un établissement public administratif dédié à la sauvegarde de la biodiversité sous la tutelle des ministres chargés de l’environnement et de l’agriculture. Doté d’un budget de 492 millions d’euros (budget initial 2022), il s’appuie sur l’expertise de près de 3 000 agents, dont une grande partie agit sur le terrain avec, notamment, 1 700 inspecteurs de l’environnement.
L’établissement est au cœur de l’action pour la préservation du vivant dans les milieux aquatiques, terrestres et marins, tant en métropole que dans les Outre-mer. Les équipes interviennent chaque jour pour lutter contre l’érosion de la biodiversité face aux pressions exercées par la destruction et la fragmentation des milieux naturels, les multiples pollutions, la surexploitation des ressources naturelles, les conséquences du changement climatique, l’introduction d’espèces exotiques envahissantes.
A ce titre, l’OFB est responsable de 5 missions complémentaires :
La Direction de la Recherche et Appui Scientifique (DRAS) est l’une des 2 directions « connaissance » de l’OFB, en charge de la recherche et de l’expertise sur les espèces, sur les milieux, leurs fonctionnalités et leurs usages, ainsi que sur les risques sanitaires en lien avec la faune sauvage.
Contexte
Chez les oiseaux, les anomalies relatives au bec sont particulièrement visibles et les individus qui en sont porteurs ont bien souvent des difficultés à s’alimenter, compromettant leur capacité à survivre et à se reproduire. Heureusement, elles sont généralement très rares et ne sont donc pas considérées comme susceptibles d’affecter significativement la dynamique d’une population (Pomeroy 1962, Craves 1994). Mais la fréquence de ces anomalies pourrait bien être largement sous-estimée, en lien avec la faible survie des individus concernés.
Depuis la fin des années 2000, des anomalies plus fréquentes sur la taille et/ou la forme du bec ont été relevées sur des dizaines d’espèces d’oiseaux à travers le monde. Celle la plus fréquente consiste en une élongation anormale du bec, généralement accompagnée d’un recourbement entraînant un croisement des deux mandibules. Elle semble avoir d’abord touchée plus particulièrement des espèces de corvidés, de pics et de sitelles en Alaska, ainsi que la mésange à tête noire Poecile atricapillus pour laquelle des études plus poussées ont été entreprises. Les taux de prévalence ont atteint 16,9% chez la Corneille d’Alaska Corvus caurinus et 6,5% chez la mésange à tête noire (Handel et al. 2010, Hemert & Handel 2010). Le mécanisme responsable de cette malformation, une production accélérée de kératine (Hemert et al. 2012), puis un lien entre ce dysfonctionnement et la présence d’un nouveau Picornavirus, ont depuis été établis puis confirmés chez la mésange à tête noire (Zylberberg et al. 2016, 2018). Ce type de malformation semble désormais assez répandu à travers le monde (voir par exemple Gorosito et al. 2016, Valdebenito et al. 2018) et le virus incriminé se retrouve chez de multiples taxons (Zylberberg et al. 2021).
Hormis ce cas d’étude in natura, les malformations du bec ont principalement été étudiées sur des individus captifs. Elles sont généralement en lien avec des problèmes nutritionnels (vitamine D3, Calcium), des origines infectieuses (bactéries, virus, mycoses, mites, helminthes) ou génétiques (Boussarie 2002, Olsen 2003). Il est en effet très difficile de déterminer la cause d’une malformation sur des individus sauvages sans les capturer et faire des prélèvements pour rechercher d’éventuelles pathogènes ou contaminants. Et même la présence d’éléments incriminants n’indiquerait pas forcément un lien de cause à effet. Les premières pistes de recherche sur les élongations de becs en Alaska s’étaient d’ailleurs focalisées sur les contaminants et les dommages chromosomiques avant de découvrir la présence d’un nouveau virus (Hemert & Handel 2015, Zylberberg et al. 2016).
Un autre type de malformation particulièrement peu documentée concerne les individus ayant un bec anormalement petit ou court. L’observation d’un oiseau sauvage ayant un bec anormalement court peut être interprété comme résultant d’un accident, d’une collision et pas forcément d’une malformation. Il existe de ce fait assez peu d’information à ce sujet et les seules études bien documentées concernent des individus captifs. Une étude sur des canards d’élevage suggère un lien fort avec un parvovirus découvert dans les années 70 en France (Palya et al. 2009). Cette malformation s’accompagne d’un sévère problème de croissance causant un nanisme marqué. Des cas similaires ont été observé sur d’autres espèces de canards en Chine (Li et al. 2016, Wang et al. 2016, Ning et al. 2018, Wan et al. 2019) et plus récemment en Egypte (Soliman et al. 2020) et en Pologne (Matczuk et al. 2020). D’autres études sur la Caille japonaise Coturnix japonica ont montré une origine génétique de malformations impactant la taille des membres dès le stade embryonnaire (micromélie, achondroplasie, chondrodystrophie, Hill et al. 1963, Collins et al. 1968, Hermes et al. 1990, Tsudzuki et al. 2011). Elles sont dues à une mutation autosomique récessive. La plupart des embryons sont morts avant d’éclore ou quelques jours après. Une femelle a tout de même survécu et pondu des œufs en captivité.
Quelques observations d’oiseaux sauvages à bec anormalement court sont néanmoins reportées. Les cas les plus évidents concernent généralement des espèces à bec long, notamment des limicoles comme la Bécasse des bois et le Courlis cendré. La Bécasse des bois enregistre un nombre particulièrement important de signalements, plusieurs centaines (Rix & Spano 2017). La première bécasse à bec anormalement court, dite brévirostre, a été signalée en 1933 en Bretagne (Fraguglione, 1983). Cette dernière avait un bec de 38 mm de long, soit deux fois moins que la normale. D’autres signalements ont par la suite eu lieu au Danemark en 1948, en Italie en 1955, en Hollande en 1957, en Suède en 1966 (Boidot, 2012a). Le nombre de cas reportés a ensuite augmenté de manière exponentielle. En 1979, plus de 78 cas étaient déjà recensés à travers l’Europe de l’Ouest et plus d’une centaine furent signalés entre 1981 et 1984 rien qu’au Royaume-Uni (Mac Kelvie, 1984). Aujourd’hui, des dizaines de signalements transitent chaque année par les réseaux sociaux dans toute l’Europe et jusqu’en Russie.
L’origine de cette malformation chez la Bécasse des bois reste totalement inconnue. Comme pour toutes les autres anomalies de ce type, elle pourrait résulter de carences alimentaires, de mutations génétiques, de l’exposition à des contaminants toxiques ou à des agents infectieux. Afin de permettre d’identifier les causes les plus probables, deux études ont été menées par des étudiants en école vétérinaires dans le cadre de leur thèse de Doctorat Vétérinaire (Galizzi 2020 ; Giraut 2020). Il s’agissait de comparer l’anatomie de 54 bécasses brévirostres à 50 témoins afin d’identifier si d’autres différences existaient que la longueur du bec. La mise en évidence d’autres anomalies permettrait notamment d’orienter les futures recherches sur l’origine de cette malformation.
Bibliographie citée
Boussarie D. (2002) Anomalies and Disorders in Beak and Feathers WSAVA 2002 Congress
Gorosito et al. (2016) Beak deformities in north Patagonian birds. Ornitología Neotropical 27, 289-295.
Handel et al. (2010) Epizootic of beak deformities among wild birds in Alaska: an emerging disease in North America? The Auk 127, 882–98.
Hemert & Handel (2010) Beak Deformities in Northwestern Crows: Evidence of a Multispecies Epizootic. The Auk 127, 746-751.
Hemert et al. (2012) Evidence of accelerated beak growth associated with avian leratin disorder in black-capped chickadees (Poecile atricapillus). Journal of Wildlife Diseases 48, 686-940.
Hemert & Handel (2015) Environmental contaminants and chromosomal damage associated with beak deformities in a resident North American passerine. Environ Toxicol Chem. 34,314-327.
Li C., Li Q., Chen Z. & Liu G. (2016) Novel duck parvovirus identified in Cherry Valley ducks (Anas platyrhynchos domesticus), China. Infection, Genetics and Evolution 44, 278-280.
Mac Kelvie, C. (1984). Short-Billed woodcock : More Information needed. Woodcock and Snipe Research Group Newsletter, 10, 21.
Povarenkov A. (2004) The first short-bill woodcock bagged on roding in Russia. Woodcock & Snipe Specialist Group, Newsletter 30. 18-18.Pomeroy, D.E., 1962. Birds with abnormal bills. Brit Birds, 55: 49-72.
Rix & Spano (2017) Sighting and unusual behaviour of a short-billed Woodcock Scolopax rusticola in Oslo Fjord (Norway). Avocetta 41, 22-24
Wan et al. 2019 Novel goose parvovirus in domestic Linwu sheldrakes with short beak and dwarfism syndrome, China. ransbound Emerg Dis. 66, 1834-1839.
Wang et al. 2016 Identification of a novel goose parvovirus (GPV) recombinant associated with short beak and dwarfism syndrome in Mainland China. Infect Genet Evol. 41, 289-291.
Zylberberg et al. (2016) Novel Picornavirus Associated with Avian Keratin Disorder in Alaskan Birds. mBio. 26;7(4):e00874-16.
Zylberberg et al. (2018) Avian keratin disorder of Alaska black-capped chickadees is associated with Poecivirus infection. Virology Journal 15, 100.
Zylberberg et al. (2021) Poecivirus is present in individuals with beak deformities in seven species of North American birds. J. of Wildlife Diseases, 57, 273-281.
L’objectif de ce stage est de poursuivre les travaux entrepris par P. Gallizi et C. Giraut en 2020 sur ces échantillons de bécasses à bec anormalement court versus normales. L’étudiant devra dans un premier temps synthétiser la littérature existante sur ces malformations chez les oiseaux. Il devra ensuite appliquer des méthodes statistiques adaptées pour quantifier les différences morphologiques entre ces deux groupes. A partir des résultats, il devra émettre des hypothèses sur les causes possibles de cette malformation et l’impact que cela pourrait avoir sur les populations. Enfin, une part importante du stage sera dédiée à la rédaction d’un article scientifique, en anglais, présentant les résultats de ce travail.
Si les ressources disponibles le permettent, le stagiaire sera invité à poursuivre son travail durant quelques mois (CDD) dans le but de soumettre cet article scientifique à une revue internationale à comité de lecture (évaluation par des pairs).
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